Voyage en Dzoungarie (nord Xinjiang)

Me revoilà à Xichang après un mois sur les routes de Chine. Je fais une pause dans mon travail pour vous parler de la Dzoungarie, que j’ai visitée après le Tibet oriental (du 18 au 29 Septembre). Vous n’avez probablement jamais entendu parlé de la Dzoungarie. C’est une région située tout au nord du Xinjiang, qui est la région autonome Ouïghoure au nord-ouest de la Chine, dont la capitale est Urumqi.

Urumqi, capitale du Xinjiang

C’est donc à Urumqi que commence mon voyage. La partie nord de la ville, où est situé mon hôtel, me rappelle un peu Pékin : des avenues rectilignes très larges, avec très peu de petits commerces. Les avenues ont en leur milieu des barrières qui empêchent de traverser (il faut pour cela prendre des passerelles ou souterrains au carrefours). Les voies automobile, cyclables et trottoirs sont compartimentées, on dirait que rien ne doit dépasser. Des quatre voies traversent aussi la ville à différents endroits. Bref, la ville n’est pas faite pour les piétons !

Trottoir Urumqi

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À un moment, je dois même marcher sur le bord d’une quatre voies en  centre-ville, n’ayant pas trouvé le passage pour piétons !

4 voies Urumqi

Ça c’est ma première impression d’Urumqi, mais la ville possède aussi un centre « historique » un peu plus intéressant car plus typé. Les Ouïgours sont une ethnie musulmane apparentée aux Turcs. Le centre ville possède donc plusieurs mosquées, et il y a de nombreux barbus et hijab dans les rues.

Dans cette ville de Chine, je me fond parfaitement. Personne ne me prend pour un étranger, tant je ressemble à certains Ouïghours, ce qui me va tout à fait !

Urumqi, depuis les récents attentats ouïghours au couteau et à la bombe, est le seul lieu de Chine classé par le ministère des affaires étrangères français comme « Déconseillé sauf raison impérative ». Je ne dirai pas qu’il règne une tension dans la ville, mais clairement les autorités prennent la menace au sérieux. Avant de monter dans un bus à Urumqi, des agents vous passent un détecteur de métaux portable sur le corps. Pour monter à bord du BRT (le bus rapide : Bus Rapid Transit), il faut passer un portique de détection et un scan des baggages. Les sacs sont ouverts pour voir le contenu. Les bouteilles de liquide restent à l’entrée. Même pour entrer à KFC, on passe un portique et les sacs sont ouverts par un agent de sécurité. Le pire, c’est la série de contrôles à la gare, aussi stricte que dans un aéroport.

La vue emblématique d’Urumqi, c’est probablement son nouveau centre commercial, qui inclut un bazar et aussi un Carrefour !

Centre ville Urumqi

Malheureusement, je n’ai eu que très peu de temps au final pour déambuler dans les rues d’Urumqi, car mon objectif était le nord du Xinjiang : je n’y ai donc passé qu’une journée et demi dont plus d’une demi journée pour récupérer des billets de train à la gare (après deux heures de queue !) et pour visiter des hôtels…

Un peu de géographie

Le Xinjiang est divisé en gros en deux parties : au nord le bassin de la Dzoungarie, et au sud le bassin de Tarim où est situé le désert du Taklamakan.

Carte Xinjiang

Usuellement, l’image qu’on se fait du Xinjiang correspond plus à la partie sud, qui est davantage peuplée par les Ouïghours, et où passait autrefois la route de la soie.

Au nord le la Dzoungarie se trouve la préfecture d’Ili, qui est une préfecture autonome Kazakh. De fait la population est composée à 45,2 % de Han (chinois) puis 25,4% de Kazakhs et 15,9% de Ouighours.

Mon objectif est l’extrême nord de cette région, la préfecture d’Altay, à quelques dizaines de kilomètres des frontières mongole, kazakhe et russe.

Entre Urumqi et Altay

Pour aller tout au nord du Xinjiang, il y a deux possibilités : par la route, ou par l’avion (aéroport de Kanas). Le mieux est évidemment de passer par la route, ce qui permet notamment de traverser le désert de Gurbantünggüt.

Le désert de Gurbantünggüt

Ce désert est un « désert tempéré ». Ce n’est pas une étendue de dunes de sable comme on représente souvent le désert (pour cela, voir mon prochain article sur le désert de Gobi en Mongolie Intérieure), il y a en effet à sa surface des lichens, surtout dans le sud du désert.

Route désert Gurbantunggut

Cité Fantome Karamay

Cette dernière photo a été prise à la « ville fantôme » d’Urho sur la route de retour, une zone où l’on peut voir de nombreux reliefs érodés dans lesquels le vent en s’y engouffrant donne un son qui peut évoquer le sifflement d’un fantôme… Non loin de là, on peut aussi voir sur le bord de la route une large zone d’exploitation d’hydrocarbure avec de nombreux puits de pétrole.

Puits de pétrole Xinjiang

La particularité de ce désert, c’est aussi d’abriter le pôle d’inaccessibilité terrestre, c’est à dire le point du globe le plus éloigné de toute mer ou tout océan (il est situé à plus de 2600 km de toute côte).

 Montagnes et lacs

Entre Urumqi et le lac Kanas à l’extrême nord du Xinjiang, il y a aussi deux sites naturels remarquables : le « lac céleste » Tianchi (天池) situé dans les « monts célestes » Tianshan (天山) et le parc naturel de Koktokay (可可托海, keketuohai).

Le lac céleste est très proche d’Urumqi. Il est à un peu plus de 1900 mètres d’altitude. L’air y est particulièrement pur, et les couleurs sont très belles en cette période entre le bleu du lac, le feuillage automnal et les monts enneigés.

Lac Tianchi Xinjiang

Le parc naturel de Koktokay quant à lui a été un vrai coup de cœur : paysages magnifiques (monts, vallées et rivières), feuillages d’automne des arbres, et troupeaux (moutons, chèvres, vaches et chameaux).

Koktokay

Koktokay

Paysages Koktokay

Vallée Koktokay

Moutons Koktokay

Cheval Koktokay

Troupeaux Koktokay

Troupeau bergère Koktokay

Chameau Koktokay

La région du lac Kanas

Le lac Kanas est situé à l’extrême nord du Xinjiang. Il est peuplé par deux ethnies principalement : les Kazakhs ainsi que les Touvains, qui sont un peuple turcophone mais de culture mongole. La Chine, qui ne comporte officiellement que 56 ethnies ne les reconnait pas comme une ethnie à part entière, mais les considère comme faisant partie de l’ethnie mongole (cela fait partie des petites aberrations de la classification, au même titre que les Mosuo du lac Lugu à la frontière Suchuan/Yunnan sont classés parmi les Naxi. Ceci dit, alors que les Mosuo nient le fait d’être des Naxi, les Touvains ne réfutent pas le terme de Mongol, mais précisent « Mongol Touvain »).

La région du lac Kanas étant juste à côté des frontières, certaines zones peuvent être inaccessibles aux étrangers, notamment le petit village de Baihaba (白哈巴).

Autre inconvénient de ce lieu, tout est extrêmement cher, notamment la nourriture. Il n’y a presque aucun restaurant, et tous sont excessivement cher (le plat de nouilles à 48 yuans, au lieu d’être à 15 yuans normalement). Ceci dit, on peut comprendre le désir des locaux de s’enrichir au maximum pendant cette saison. L’hiver, tout est recouvert sous un ou deux mètres de neige, et il n’y a aucun tourisme. Celui-ci se concentre presque entièrement aux mois de Septembre et Octobre.

J’ai donc passé deux jours entiers dans cette réserve, et ai dormi deux nuits dans un petit village touvain.

Village touvain Kanas

Un petit village charmant, bien qu’un peu rustique : pas de sanitaire, et nuit très fraîche, sans chauffage évidemment !

Intérieure maison touvaine

Ceci dit, la réserve est magnifique. Un dessin valant mieux que de longs discours, voici quelques photos du lieu :

Matin lac Kanas

Montagne lac Kanas

Lac Kanas

Vous remarquerez les paysages typiques de la taïga.

Rivière croissant de lune

Rivière lac Kanas

Paysage lac Kanas

Paysage lac Kanas

Village de Hemu

Mon voyage se termine par la découverte du petit village de Hemu, non loin du lac Kanas. Pour s’y rendre, le mieux est de marcher sur le chemin de randonnée depuis Jiadengyu. L’avantage est que l’on peut y faire une vraie randonnée sur le chemin de montagne et qu’il y a peu de gens (généralement les touristes Chinois font le trajet en voiture, moto ou cheval). L’inconvénient est que, tourisme à la chinoise oblige, il y a un péage pour emprunter cet itinéraire.

Randonnée jusqu'à Hemu

J’ai commencé la randonnée vers 11 heures le matin pour arriver après la tombée de la nuit vers 21 heures, terminant la marche de 40 kilomètres environ. Si vous y allez, ne faites pas comme moi, partez plus tôt ! On peut aussi faire la randonnée en deux fois. Il y a deux ou trois petits refuges sur la route.

Randonnée jusqu'à Hemu

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Le village de Hemu est comme le village touvain de la veille un minuscule village, tout à fait charmant. Ici ce ne sont pas des Touvains, mais des Kazakhs. Il est possible d’y faire du cheval. La nuit, l’observation des étoiles est de très bonne qualité, et on voit sans problème la voie lactée.

Village Hemu

Conclusion sur la Dzoungarie

Cette région est vraiment exceptionnelle par ses paysages, je la conseille donc vivement à ce qui sont curieux de régions inhabituelles et isolées de Chine. Il faut vraiment venir soit en Septembre, soit en Octobre pour profiter de la meilleure saison.

La prochaine fois que j’irai dans le Xinjiang, ce sera dans sa partie sud avec le désert du Taklamakan et le peuple Ouïghour.

Dans les prochains articles, je vous parlerai de la suite de mon périple dans le Gansu sur la route de la soie puis en Mongolie Intérieure dans le désert de Gobi !

2 réflexions au sujet de « Voyage en Dzoungarie (nord Xinjiang) »

  1. C’est vraiment hyper beau !
    Ca doit être trop cool à visiter..
    Bon.. seul hic.. Vaut mieux être un garçon, quand même.. un peu craignos, sinon 🙂

    1. En fait ça va, c’est plutôt la partie sud du Xinjiang qui craint un peu, mais surtout pour les Chinois Han, pas vraiment pour les Occidentaux qui comme je le disais peuvent relativement se fondre dans le paysage (à condition de ne pas se mettre à parler en mandarin !)

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